Conjoncture financière à fin septembre 2021
Un trouble-fête dans la reprise
La crise sanitaire constitue toujours une menace qui plane sur les économies. Ces dernières tentent de s’en accommoder. Certains pays tel que le Royaume Uni ont décidé de « de vivre avec ».
La vaccination poursuit sa route, plus modérément cependant, et de nouveaux outils préventifs sont testés. Ces avancées contribuent à dégager un peu mieux l’horizon économique des prochains mois. Les indicateurs d’activité marquent cependant le pas. Et s’ils restent en territoire positif, le fort rebond constaté en début d’année est dans sa phase d’épuisement. Ainsi en zone euro, l’exceptionnelle croissance de plus de 9,2 % annualisée du second trimestre de l’année n’effacera pas le retard de l’activité qui s’est accumulé depuis la survenance de la crise. Ce dernier reste encore à plus de 3 points de son niveau de la fin 2019. Il en est de même dans les grands pays de la zone. En France, même si l’année se terminera sur une performance inédite proche de 6,5 % selon les autorités, le retard de croissance de l’année 2020 ne sera probablement pas comblé avant mi 2022.
Du côté des entreprises les indices de production sont repassés en territoire négatif en septembre -2 % en zone euro, près de -4 % en Allemagne et si un chiffre ne fait pas une tendance, rares sont les secteurs qui échappent à cet essoufflement. Alors que les perspectives et les carnets de commandes restent bien orientés, la production peine. Les pénuries et les difficultés d’approvisionnement qui s’entremêlent dans les problèmes d’offre viennent à présent se conjuguer aux hausses des prix. Dans une dynamique de croissance qui n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant la crise, ces obstacles paraissent très prématurés. Pourtant, ils sont à la fois la conséquence d’une demande qui s’est concentrée pendant de longs mois sur les produits industriels et d’une désorganisation des chaînes de production. L’envolée des prix énergétiques en est une illustration. Bien sûr, le cours du pétrole s’est redressé. Pour autant, il n’est pas encore revenu aux pics qu’il avait connu en 2008 et en 2015. Mais le prix du gaz, de l’électricité et celui du charbon, source énergétique d’importance dans de nombreux pays, ont été pris en tenaille entre une demande qui s’est vivement redressée sous l’impulsion de la reprise et les aléas sur l’offre. Elles vont des difficultés de production, gaz de Norvège ou de Russie, aux encombrements dans le transport et l’acheminement. Ces mouvements d’ensemble pèsent inéluctablement sur le comportement de consommation des ménages. En dépit d’une épargne qui reste encore pléthorique, ces derniers se risquent moins à la dépense, questionnant la dynamique de consommation et par ricochet celle de la croissance. Les coûts en hausse vont aussi affaiblir les marges des entreprises surtout dans les secteurs les plus énergivores de l’industrie. Même si une partie de ces hausses pourra être transférée dans les prix finaux, elle ne suffira probablement pas à préserver les marges.
Le rebond de l’inflation consécutif à ces changements, 3,3 % en zone euro, plus de 5 % aux Etats-Unis depuis le mois de mai, interrogent aussi les banquiers centraux. Ils hésitent encore sur le caractère durable ou transitoire de ces tensions, soufflant le chaud et le froid auprès des investisseurs plus fébriles face à des évolutions qui leur seraient moins favorables. Le trouble- fête va sans aucun doute s’apaiser mais il ne s’assagira pas au niveau précédant cette envolée. Une nouvelle page de la sortie de pandémie se tourne.
Brigitte TROQUIER – Economiste BRED Banque Populaire
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